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Plutôt que de lever l'étendard vengeur de la chrétienté menacée, elles ont aimé, jusqu'au martyr, leurs frères musulmans du Yémen.

Dans les contrées enzemmourées, où l'on trépigne déjà d'en découdre, on appelle ça de l'"angélisme" et du "droit de l'hommisme"!

 

Pierre Chidoli nous transmet cette version augmentée de son texte-témoignage, initialement publié sur le site de Limite.

 

Un pont lancé entre foi catholique et décroissance, les martyres d'Aden

Ne touchez pas à nos martyrs !

 

 

Vendredi 4 mars à Aden au sud du Yémen, quatre missionnaires de la Charité et douze volontaires ou patients de leur dispensaire ont été assassinées, vraisemblablement par des fous furieux de l’Etat Islamique.

Trois années passées dans une ville du centre du Yémen où les sœurs avaient un autre dispensaire m'avaient permises de rencontrer une de ces religieuses. Sœur Marguerite était africaine, arabisante, profonde, énergique, sympathique et très drôle. Sa joie, sa prière et sa compassion, elle l'offrait aux vieillards, aux handicapés, que les dispensaires recueillaient, hébergeaient et nourrissaient.

 

Les sœurs de Mère Teresa sont arrivées au Yémen en 1974. Dans ce pays exclusivement musulman, elles vont d'abord s'occuper de lépreux qui vivaient réfugiés dans des grottes entourées de décharges. Dans ces immondices, elles vont créer un jardin, édifier des maisons et elles vont soigner les lépreux, leur apprendre un métier... Le gouvernement est émerveillé par le travail et le dévouement des sœurs, qui vont recevoir son aide pour fonder trois autres maisons au Yémen.

Dans une lettre au pape, un chef de province écrit : “la présence des sœurs de Mère Teresa a apporté une nouvelle lumière dans la vie de notre peuple”. Elles vont choisir dans ce pays musulman d'aider des pauvres juste parce qu'ils ont besoin d'aide et pour partager avec eux la lumière de la bonté de Dieu.

Les yéménites le voient et ils vont leur faire confiance. Le gouvernement propose alors aux sœurs de leur construire une église. Mère Teresa va refuser, comme elle va refuser la plupart des jeunes filles musulmanes qui souhaitent devenir missionnaires de la charité, pour ne pas provoquer la population et compromettre la présence de la communauté. Pour Mère Teresa et ses sœurs, leur vocation est d'être bonnes et généreuses pour les pauvres et elles acceptent leur culture telle qu'elle est.

 

L'impérialisme, la société industrielle, l'exode rurale, le pétrole et la convoitise des sociétés occidentales vont en quarante ans ravager l'équilibre de ce pays magnifique qui avait gardé un mode de vie très traditionnel. Une classe dirigeante corrompue, le réchauffement climatique, une population déboussolée et abreuvée de propagande fanatique ont ensuite crée le cocktail d'une guerre civile alimentée par nos avions, nos missiles et nos chars, magnifiques joujoux de l'armée saoudienne.

Dans ce chaos, les dispensaires des missionnaires de la charité vont rester des oasis de calme et de compassion. Malgré le danger des bombes de la coalition et le développement d'un islamisme déviant et radicale, les sœurs ne peuvent pas abandonner un peuple qu'elles aiment : “Nous restons avec les handicapés ! Pas question de quitter le pays ! C’est notre vocation !”.

 

Lorsque j'ai appris la triste nouvelle, j'ai recherché sur internet le visage d'une amie, le récit de leur mission... Mon moteur de recherche me renvoyait systématiquement vers les grands médias, où des journalistes décrivaient froidement les faits en deux colonnes sans arriver à exprimer ce que ces religieuses vivaient.

 

Mais ils me renvoyaient aussi vers des sites dits catholiques ou au milieu d'articles sur la France en dhimmitude, les dangers des sauvages immigrés, ces religieuses étaient utilisées pour alimenter la rhétorique de l'occident chrétien menacé par les barbares musulmans !

Mais comme elles étaient loin ces sœurs de l'idéologie nauséabonde que promeuvent ces laïcs dits catholiques. Ces sœurs vivaient parmi les musulmans, elles les aimaient entièrement avec leur culture et leur religion. Elles étaient remplies de l'amour du Christ pour les plus pauvres et les tous petits. Ces sœurs venaient toutes de pays qui ont souffert ces 150 dernières années du nouveau monde forgé par la domination occidentale. Ces sœurs avaient toutes des compatriotes, des frères ou des amis que notre merveilleuse civilisation force à s'échouer sur nos frontières.

Alors messieurs de la christianophobie, du salon brun et consorts, ces sœurs ne sont pas mortes pour votre catholicité de pharisiens, votre vieille France, rance consanguine et entourée de barbelés. Vos martyrs, ils s'appellent Domique Venner et ils se suicident, étouffés par leur haine.

 

Ces sœurs et leurs sourires de gaieté, ce sont nos martyres; martyres d'une église catholique pour laquelle lorsque Jésus a soif, c'est de l'amour des hommes.

Ce sont les martyres d'une église catholique dont le pape dit à leur sujet qu'elles « n’ont pas été seulement victimes des assaillants mais aussi de la mondialisation de l'indifférence »

Ce sont les martyres d'une église catholique par laquelle l’évêque du Yémen nous donne cette prière :

Père, pardonne aux bourreaux, ils ne savent pas ce qu’ils font !

Seigneur, ajoute le sacrifice de sœur Marguerite, sœur Reginat, sœur Judith et sœur Anselm à ta souffrance. Tu peux en faire la semence pour la paix et la justice.

Protège le peuple yéménite et ceux qui sont laissés sans les soins et la charité des sœurs.

Protège le Père Tom Uzhunnalil, leur aumônier qui a été enlevé et dont nous n’avons pas encore de nouvelles.

 

Pierre Chidoli

 

 

 

 

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